universalisation du fédéralisme
§2 : L’UNIVERSALISATION DU FEDERALISME
Le fédéralisme a été pratiqué dans l’histoire par les anciennes civilisations. En Afrique, il est attribué aux efforts d’Asante Hene. L’organisation du royaume Ashanti[1] amorçait le pas du fédéralisme avant même la constitution américaine de 1789, suite au pacte de Philadelphie du 17 septembre 1787, n’institua le premier Etat fédéral moderne organisé de la manière suivante selon les lois de Georges Scelle: la superposition, l’autonomie et la participation. C’est l’absence de ces trois éléments qui a causé des difficultés à l’Union française ainsi qu’à
Dans cette qualité d’Etat, les compétences de l’Etat sont partagées entre les différentes entités territoriales qui composent l’Etat. C’est la constitution qui en règle générale reconnaît toutes les compétences non attribuées à l’Etat fédéral aux entités fédérées[2]. Celles-ci sont appelées différemment dans le droit positif de l’Etat concerné. Par exemple, ces entités territoriales sont des « Länder » en Allemagne, des « Etats » aux Etats-Unis d’Amérique ou au Nigeria, des « Provinces » en Afrique du Sud, … Mais cette diversité terminologique ne peut affecter cette spécificité dès lors que toutes les lois la gouvernant sont réunies. C’est d’ailleurs le cas de
Tous les Etats qui transfèrent leurs compétences à d’autres entités, personnes de droit public, se rapprochent de cette forme d’Etat. En effet, un Etat unitaire décentralisé présente déjà de facto une superposition parce que chaque collectivité locale possède un organe de décision, une législature en miniature ; il ne connaît pas l’autonomie ni la participation. Mais, la nouvelle organisation décentralisée en France se rapproche d’une autonomie. D’ailleurs, on passe par étape de l’Etat unitaire à l’Etat régional qui a pour paroxysme l’Etat fédéral.
Le fédéralisme est une organisation politique qui permet de maintenir sous l’autorité politique des ensembles très vastes le plus souvent ayant des races, langues ou cultures différentes. Appliqué à l’Etat, il concerne une collectivité humaine assise sur un territoire au sein duquel l’autorité politique est fractionnée et dépendante d’une autre autorité politique centrale. Ce qui voudrait dire que dans cet Etat, seule l’autorité centrale est souveraine[3] ; celle-ci a la qualité d’un sujet de droit international ayant des droits et devoirs. La politique internationale est donc le domaine réservé de l’Etat souverain[4]. Par conséquent, la qualité de sujet de droit international reconnu à
Les défenseurs[5] de la souveraineté de la société internationale s’appuient sur une telle organisation en vue de mettre au point une société plus active à mener ses missions de paix et de sécurité internationale. En effet, une société n’étant pas organisée comme dans l’ordre national aura de la peine à imposer la sécurité par défaut d’une institution permanente garante de l’ordre public comme les forces publiques dont disposent les Etats. En ce sens, Raymond Aron voyait déjà dans la voie de la fédération planétaire la même voie que celle de la paix par le droit. La démarche décisive serait l’abandon du droit de se faire justice soi-même, c’est-à-dire de ce qui a été et de ce qui est encore l’essence de la souveraineté[6] en droit international.
Il faut noter que le droit international n’a pas une procédure déjà définie par laquelle une entité viendrait à acquérir sa personnalité comme dans l’ordre national. Si les Etats ont des procédures d’acquisition de la personnalité juridique dans leur droit positif, cela est différent sur la scène internationale. Par ailleurs, les OIG ont une souveraineté attribuée par les Etats en vertu de leurs but et objectif mais les entités étatiques accèdent à cela suite à une indépendance[7] suivie d’une reconnaissance.
L’immédiateté internationale constitue un critère à prendre avec modération dans la gestion des collectivités décentralisées et fédérées puisqu’il y a des accords de partenariat entre ces collectivités par exemple le département de
Certains actes de souveraineté que Jean Bodin[8] énonce dans sa République sont aujourd’hui hors de la compétence de l’Etat unitaire pour intégrer celle d’un ordre supranational ou international que l’Etat lui-même a institué. C’est le cas de l’Union européenne qui a le monopole de la politique dans son cadre de compétence propre. Elle milite jusqu’alors pour s’approprier aussi le monopole de la politique internationale car cette OIG sui generis est la seule à avoir des institutions démocratiques élues par les populations concernées qui sont des citoyens européens. Une telle logique de nature fédérale transforme de plus en plus (…) les Etats européens en de simples Etats membres d’une construction supranationale[9]. Aussi est- elle la la refondatrice de la souveraineté des Etats membres[10].
Par ailleurs, cette politique d’intégration n’épargne pas le Congo-Brazzaville qui avec ses voisins de la région et ceux de la sous-région participe à des organisations reflétant le fédéralisme. En effet,
Il est vrai que les pères fondateurs des Etats africains aspirent à une solidarité pour relever le défi du développement. Ils ont manifesté une volonté farouche pour le fédéralisme qui a connu des échecs avant son retour sous une autre forme. Le Sénégal et le Soudan français, actuel Mali, en ont fourni un exemple sous l’appellation de fédération du Mali, voire aussi l’union du Cameroun anglophone et du Cameroun francophone en 1961 et celle de Tanzanie : union de Zanzibar et du Tanganyika. Les Etats africains se sont promis une telle solidarité dès la signature de l’acte constitutif de l’OUA, aujourd’hui l’UA.
Cette pratique du fédéralisme par association des Etats tend à faire disparaître les anciennes formes d’Etat qui du jour au lendemain prônent une décentralisation. Cette dernière est devenue une pratique très utilisée en droit positif des Etats. Elle contribuera à la transformation des Etats unitaires en Etats régionaux comme le Congo- Brazzaville si les gouvernements arrivent à laisser la gestion des intérêts locaux aux autorités locales décentralisées choisies sainement par les populations concernées. Ces autorités doivent disposer d’une large manœuvre incluant l’autonomie ainsi que la participation dans la gestion de l’action de l’Etat. C’est ainsi que
En somme, l’organisation interne du pouvoir se fait davantage par fractionnement des compétences de l’Etat au sein du territoire en vue de rapprocher les populations de l’autorité. Dans ce monde où la pauvreté est un défi à relever, la décentralisation est préférée plutôt que la concentration de l’autorité, source de dictature et des conflits au Congo-Brazzaville. Cette décentralisation doit s’approprier les lois d’autonomie et de la participation, chères à un fédéralisme.
Les difficultés techniques de l’Etat dans plusieurs domaines justifient son adhésion à des associations d’Etats[12] souvent appelées OIG. Celles-ci prennent des natures différentes en fonction de la qualité de compétences transférées évoquées précédemment. En effet, les organisations d’intégration économique qui sont les plus répandues parmi celles créées au cours de ces deux dernières décennies dans les régions ou sous-régions prouvent le pas amorcé vers un fédéralisme qui n’est autre que l’intégration politique.
Le fédéralisme est le système le mieux adapté dans les Etats qui ont du mal à assurer l’effectivité de l’autorité de l’Etat sur toute l’étendue du territoire national. En effet, cela semble témoigner de la volonté d’une nouvelle politique de décentralisation au Congo-Brazzaville fondée sur une « municipalisation accélérée » et qui se concrétise par une rotation de la célébration de la fête nationale entre les différents chefs-lieux des départements depuis 2003.
[1] GONIDEC P-F., L’Etat africain, LGDJ, 1985, p 41.
[2] MAKOUDZI- WOLO N., op. cit.
[3] CARRE DE MALBERG, op.cit., p 123.
[4] CAPOTORTI F., op. cit., p 25.
[5] On peut citer notamment KANT E. dans Vers la paix perpétuelle (1795).
[6] ARON R., Paix et guerre entre les Nations, Calmann-Levy, Paris, 2 éd. 1962.
[7] CAPOTORTI F.,op.cit., p 31; MOUTON J-D., « L’Etat selon le droit international », in colloque de Nancy, op.cit., pp 76- 106.
[8] BODIN J., op. cit.
[9] OBERDOFF H., cité par CHALTIEL F., op.cit., p 393.
[10] CHALTIEL F., op.cit., titre de la deuxième partie de sa thèse, p 259.
[11] ASSEPO ASSI, op.cit., p 1687 et ss.
[12] C’est la politique défendue par